Dans le cadre de notre ciné-club du mois d’août au CRIC, nous avons proposé une projection sur la controverse de Valladolid.
Nous voilà en 1550. C’est la date de référence de la controverse de Valladolid. Pour nous, en 2024, cette date symbolise un événement emblématique pour comprendre les dynamiques de racisme et de colonialisme.
Le débat théologique et philosophique de l’époque, organisé par le roi Charles Quint d’Espagne, a opposé deux figures centrales autour de la question de la légitimité de la conquête et de la colonisation des Amériques ainsi que du traitement des peuples indigènes.
D’un côté, Juan Ginés de Sepúlveda défendait la supériorité des Européens sur les peuples indigènes, soutenant que ces derniers étaient naturellement inférieurs et barbares. Il justifiait leur soumission arguant que les Européens avaient le devoir de civiliser et de christianiser ces populations perçues comme « sauvages ». Cette position reflète une idéologie raciste où la différence culturelle et ethnique est interprétée comme une preuve d’infériorité inhérente, justifiant la domination coloniale et l’exploitation.
En face, Bartolomé de Las Casas s’opposait à cette vision. Il défendait l’humanité et la dignité des peuples indigènes. Il condamnait les abus et les atrocités commis par les colons, dénonçant l’esclavage et le travail forcé imposés aux indigènes. Pour Las Casas, la colonisation devait se faire dans un esprit de paix et de justice, sans recours à la violence et à la coercition.
La controverse de Valladolid illustre les tensions inhérentes au projet colonial. D’un côté, elle met en lumière l’idéologie raciste qui justifiait l’exploitation et la domination des peuples colonisés. Cette idéologie se traduit par des pratiques de discrimination, de déshumanisation et de violence, visant à maintenir la supériorité des colonisateurs. De l’autre, elle révèle une prise de conscience naissante des droits humains et de la nécessité d’une approche plus éthique et respectueuse des cultures indigènes.
Malgré les arguments de Las Casas, la colonisation espagnole continua à se baser largement sur des principes de supériorité raciale et d’exploitation économique. Les débats de Valladolid n’ont pas réussi à renverser les structures de pouvoir et d’injustice profondément ancrées dans le système colonial. Néanmoins, ils ont marqué une étape importante dans l’histoire des droits humains et ont jeté les bases d’une critique du colonialisme qui allait se développer au cours des siècles suivants.
– Fabrice CIACCIA, directeur du CRIC
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